2.4 - Propositions
Au cours de la premiire phase, dite d'analyse, on aura réunie la matière de base et on l'aura rendu aisément utilisable c'est-à-dire convenablement regroupée, synthétisée et exprimée visuellement sur carte chaque fois que possible.
Ensuite les objectifs du maître d'ouvrage ont été explicités et le ou les thèmes potentiels ont été dégagés.
Le moment est venue maintenant pour les planificateurs de croiser toutes les données afin de pouvoir proposer un ou plusieurs scénarios pour l'interprétation du territoire considéré.
Il peut se faire qu'une seule solution s'impose facilement. Le plus souvent cependant plusieurs options paraissent concevables. Le travail du planificateur consiste alors à poser clairement les alternatives.
La mise au point des scénarios repose sur une série de choix :
- choix concernant des éléments de stratégie ;
- choix des média ;
- choix concernant leur localisation et leur enchaînement.
Nous reprendrons ces trois points dans cet ordre, bien qu'il y ait naturellement des interférences entre eux et qu'un ordre différent puisse se concevoir.
Elle sera fonction d'alternatives telles que :
- interpréter sur place ou à distance;
- concentrer ou disperser les média ;
- s'appuyer sur des initiatives ou des installations existantes ou faire du neuf ;
- recours à des services avec personnel ou à des moyens sans personnel ;
- avoir pour "cible" tous les publics, ou s'adresser à certaines catégories seulement ;
- fonctionner en toutes saisons, à tout moment de la semaine ou se limiter à certains créneaux, (par exemple, les week-ends en automne et au printemps en zone méditerranéenne : il fait trop chaud l'été et les gens vont à la mer - Il fait trop de vent l'hiver...).
A ce stade de la réflexion il convient aussi de noter le facteur "humeur" chez les visiteurs que nous illustreront par des exemples extrêmes : il est peu indiqué de prévoir des projections audiovisuelles en salle sur un site où les gens viennent principalement pcur se baigner l'été.
De même, des activités de groupes telles que randonnées guidées ou des expositions longues à visiter auront ils un piètre succès, dans les lieux que la plupart des gens atteignent après plusieurs heures de route et où ils séjournent brièvement.
Les éléments de stratégie qui ont été retenus influent sur le choix des média. Mais "la sélection des média" fait appel , a un grand nombre de critères et les travaux qui lui sont consacrès occupent une place conséquente dans la bibliographie de l'interprétation.
Ils n'aboutissent évidemment pas à des normes péremptoires qui permettraient par exemple de confier le choix à un ordinateur. Le bon sens et le flair de l'entrepreneur gardent tous leurs droits.
Nous avons noté ci-après les éléments d'appréciation qui nous semblent les plus utiles à connaître. Le lecteur se reportera par ailleurs à la nomenclature des média d'interprétation figurant en annexe.
a) D'une manière générale les services avec personnel sont considérés comme des moyens d'interprétation idéaux parce que les plus chaleureux et permettant une adaptation, avec le maximum de souplesse, au niveau et aux besoins des visiteurs.
Leur principale limite d'usage est d'ordre budgétaire. Le recours aux auxilliaires saisonniers ou bénévoles est affecté par la difficulté de leur apporter une formation satisfaisante.
Le service Fédéral des Parcs Nationaux Canadiens (Parcs Canada Dave Algar 1976) établit une différence marquée entre les media pour groupes et les services "d'homme à homme" (causeries, démonstration, visites guidées activités accompagnées...) et tous les autres (avec ou sans personnel).
Pour Parcs Canada les premiers seuls permettent d'adapter un message à un public réel, les autres étant conçus pour un public prévu, et donc théorique en grande partie.
"Dans une activité destinée à un grand public, les messages proviennent de l'interprète. L'environnement sert de complément visuel. Dans les activités de groupe les messages proviennent de l'environnement même et l'interprète aide les participants à les recevoir, à les développer et à les comprendre. Il y a des intéractions entre les gens eux mêmes d'une part, entre eux et l'environnement d'autre part... "C'est à dire une expérience enrichissante".
Ce sont aussi les moyens qui permettent de faire le plus facilement appel à d'autres sens que la vue (toucher, odorat...) et à l'activité des visiteurs. Or il est généralement admis que nous retenons 10 % de ce que nous entendons 30 % de ce que nous lisons, 50 % de ce que nous voyons et jusqu'à 90 % de ce que nous faisons.
Aussi l'interprétation "d'homme à homme" et les moyens de groupe sont-ils aptes à procurer l'expérience la plus marquante, celle qui agit non seulement à un niveau cognitif (notre compréhension des choses) mais aussi à un niveau affectif (notre adhésion à des valeurs comportement) (1).
Cependant le développement des activités de groupe est difficile dans les sites faisant l'objet d'une fréquentation très passagère. Il suppose un public effectuant un temps de séjour d'une certaine durée dans l'espace considéré ouU à proximité.
(1) Une équipe américaine inpendante (Atelier Acclimatization - Steve Van Matre) est particulièrement connue pour son travail sur les média de groupe pour les jeunes. Elle a mis au point des modules d'animation utilisant une approche ludique et sensorielle mais aussi un travail rigoureux d'interprétation des grands concepts de l'environnement.
b) La "capacité" des différents média
On appelle ici "capacité d'un média" le nombre de personnes qu'une installation ou une activité peut desservir en même temps dans de bonnes conditions, (avec efficacité, sans gêne pour, le public et sans engendrer des nuisances qui altèreraient la bonne image de l'organisateur).
Pour les média de groupe (visites guidées avec interprète, démonstrations et causeries avec participation du public) Parcs Canada fixe les seuils de participation entre 10 et 30 personnes (chiffre idéal pour les adultes 20, pour les enfants : 15). Il estime qu'au dela de ces chiffres, la dynamique de groupe ne peut être utilisée comme un élément amplificateur.
Pour les films, les diaporamas et les expositions, la capacité optimale est déterminée par la dimension des locaux et le type de dispositifs utilisés.
Pour les circuits d'interprétation, elle peut être estimée en fonction des espaces disponibles pour le stationnement et des risques de nuisances induites (gêne réciproque des utilisateurs, érosion par piétinement, déchets ... ). Il est toujours utile de s'interroger sur la capacité optimale d'un moyen d'interprétation avant de le choisir.
Parcs Canada considère que lorsque l'utilisation réelle tombe à moins de 30 % de cette capacité optimale, le service ou l'installation n' a plus lieu d'être maintenu.
Pour les films 16 mm et les diaporamas, on peut considérer en tout état de cause et en règle générale, qu'il n'est pas justifié d'effectuer des projections pour moins de 30 personnes.
c) Adéquation des média aux types de messages
Tous les média n'ont pas les mêmes aptitudes à porter les mêmes messages :
- Les dispositifs graphiques sur le terrain et les expositions, étant vu par des visiteurs debout, ne sont efficaces que pour des messages simples en brefs. Les brochures destinées à un usage sur place, sont à peu près astreintes à la même contrainte. Les diaporamas et les films permettent un discours un peu plus développé. Les moyens qui autorisent relativement le plus de complexité ou le plus d'abstraction, sont les services avec personnel (notamment les média de groupe) et les publications faite pour une lecture à domicile.
- Tous les média ne laissent pas la même latitude au concepteur réalisateur. II est maître du scénario d'un film ou d'une exposition et peut donc suivre la progression qui lui parait la plus performante. Par contre quand il s'agit de circuits auto interprétés ou même de visites guidées la progression de son récit est en grande partie déterminée par le terrain.
- Certains média ont des avantages intrinsèques. Ainsi le film en image réelle ou en dessins animés reste le moyen le plus commode quand il s'agit de rendre compte de phénomènes très dynamiques (une explosion volcanique par exemple, une bataille ... ) ou d'interpréter un processus comportant de nombreux stades intermédiaires.
En dehors de ces quelques coneidérations il existe bien sûr de nombreux autres paramètres qui peuvent faire qu'un moyen, satisfaisant dans un contexte donné, se révèle décevant dans d'autres circonstances. Nous n'insisterons pas non plus sur les critères d'appréciation généraux mieux connus des gestionnaires : les éléments de coût (en capital, en maintenance et en services), la vulnérabilité et l'impact sur l'environnement. Ainsi, dans certain milieux fragiles, les visites guidées sont elles la seule formule concevable qui permettent au visiteur un contact avec le terrain. Enfin, des considérations annexes ont leur importance : ainsi la valeur de souvenir qui s'attache aux publications.
LA LOCALISATION ET L' ENCHAINEMENT DES MEDIA
Un plan d'interprétation équilibré comportera une variété minimum de média : certains permettant un contact personnel et direct avec le terrain, d'autres impliquant une interprétation à distance. Les média de groupe, comme les visites guidées et les média plus individuels, tel les circuits auto interprétés.
Dans l'hypothèse favorable où le plan a dégagé un thème unique décomposable en sous-thèmes, chaque média ou groupe de média peut avoir à traiter une partie d'une histoire cohérente.
Il y aura donc un ordre préférentiel pour l'utilisation de ces média par le public.
Il est possible d'organiser la progression du public dans un bâtiment grâce à son architecture ou à un aménagement adéquat de l'espace. Mais en plein air, sur un site relativement étendu, cela présente plus de difficulté. Le public a naturellement des réactions d'indépendance. On ne peut agir que par recommandations exprimées de façon orale, par dépliants ou sous une autre forme à un point de réception judicieusement placé. Si le plan comporte de nombreuses propositions et si la durée de séjour des visiteurs le justifie, on peut aussi suggérer des programmes pour le premier jour, le second etc....
Il est possible aussi de prévoir habilement des renvois d'une activité à une autre : par exemple l'interprète d'une visite guidée, conseillera à son public un itinéraire auto-interprété consacré à un thème particulier.
Mais en tout état de cause, le planificateur doit se soucier de l'ordre dans lequel les divers média du plan sont destinés a être utilisés par les visiteurs.